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Campus de Caen - Le point de vue de….

par Marion Turbiez-Miquel

Anne Chevrel, Maître de conférences associée

Mon parcours professionnel ne me destinait pas à enseigner. Journaliste sur une télévision locale pendant une vingtaine d’année, j’ai la conviction que l’information est un socle nécessaire à la construction d’une pleine citoyenneté… Nécessaire mais pas suffisant ! La participation et la concertation, que j’ai étudié à Griffith University (Brisbane) puis à la Sorbonne, sont des leviers qui permettent d’aller plus loin dans l’implication du public dans les réponses à apporter à nos grandes questions de société, et tout particulièrement dans celles qui portent sur les transitions environnementales. C’est le sens de l’activité professionnelle que je développe au sein du cabinet conseil que j’ai créé en 2012, et qui propose la conception et la mise en œuvre de dispositifs participatifs aux collectivités, associations et entreprises. Cette activité m’amène à intervenir sur des territoires urbains ou ruraux (Nantes, ou les vallées de Haute-Garonne, par exemple), sur des sujets variés (la création d’un parc Naturel régional, l’implantation de méthaniseurs ou encore la co-construction de projets urbains) et à des échelles différentes. Ce sont ces processus de dialogue citoyen que j’enseigne sur le campus de Caen où je dirige le master « Concertation et Territoires en transitions » (CTT).

 

Le master CTT met l’accent sur les transitions environnementale, politique et économique à venir en formant des « transitionneurs », des acteurs qui vont être au centre de ces changements. Il les prépare à devenir des professionnels de la stratégie et du pilotage de projets, capables d’intégrer les dimensions prospective et participative dans tous les domaines liés au développement durable. Quand nous avons ouvert ce master, il y a quatre ans, c’était un pari : les postes correspondant à ces compétences n’existaient pas ! Les premiers étudiants du master ont suivi leur conviction et l’intuition qu’il y avait une place pour ces savoir-faire dans la société civile, les institutions et les entreprises. Ils ne se sont pas trompés. Depuis plusieurs années, émerge, en effet, une attente croissante du public en matière d’information, de consultation et, plus encore, de concertation. Celle-ci se traduit par une évolution des pratiques et des législations, française et européenne, pour mieux associer le public aux processus de décision. Mais cette approche dialogique ne peut être un vecteur de transition positive que dans la mesure où l’on comprend les grandes mutations à l’œuvre, les facteurs qui vont les influencer et les leviers à actionner. La prospective, discipline majeure du master, est cet outil de compréhension, de décision et de pilotage des projets. Associer ces deux disciplines est une force pour permettre un développement économique et social respectueux de l’environnement et des générations futures. L’intégration professionnelle des anciens de CTT nous prouve, aujourd’hui, que la maîtrise de ces deux outils que sont la participation et la prospective est une compétence de plus en plus recherchée.

 

Au cours de la formation nous donnons autant d’importance aux savoir-faire et aux savoir-être qu’aux savoirs. Nous faisons donc une place importante à la mise en pratique. En M1, les étudiants réalisent une action terrain grandeur nature : études et actions participatives répondent aux demandes de partenaires tels que le Pays de Coutances, SNCF réseaux, West Grid Synergy ou Caen-la-mer, qui s’interrogent sur la perception et la mobilisation du public autour de la montée des eaux, du tracé d’une LGV ou de la place du bio-gaz dans le mixte énergétique. C’est une première approche, concrète, des missions d’un transitionneur ! En M2, ce parti-pris terrain est plus puissant encore, car l’année s’effectue en alternance. Les connaissances acquises en cours peuvent directement être mises en pratique dans les structures d’accueil. Plus d’une trentaine d’associations, de collectivités et d’entreprises, au rang desquelles on compte la Région Bretagne, Nantes, Rennes et Brest Métropole, Terre de Lien, Comité 21, Engie ou encore RTE, sont partenaires de cette alternance. Cette expérience, combinée aux cours, permet d’entrer progressivement dans le monde professionnel et d’avoir une insertion plus rapide sur le marché du travail. 

 

Le réseau que nous avons tissé depuis la création du master s’appuie sur des structures aussi diverses que nombreuses. Il en va de même pour les intervenants, universitaires et praticiens qui interviennent au cours des deux ans de formation. Les consultants partagent leur expérience professionnelle, qu’il s’agisse de lobbying (Lucas Braban), de facilitation (Céline Poret), ou de management participatif (Patrice Henry). Les experts apportent leur éclairage sur les grands enjeux des transitions : ressources (Alain Geldron), droit de l’environnement (Emilie Gaillard), contentieux environnementaux (Gaëlle Audrain-Demey) ou encore sciences de l’ingénieur, dispensées par les professeurs de l’EnsiCaen. C’est le croisement de ces regards et de ces pratiques qui permet à chaque étudiant de construire son propre projet.

 

Le campus de Caen est le lieu idéal pour expérimenter et mettre en œuvre tous ces enseignements. Les initiatives et les actions y sont nombreuses – j’en veux pour preuves les nombreux exemples donnés par mes collègues Emilie Gaillard et Nicolas Escach- et l’esprit qui y règne est avant tout coopératif. Les étudiants sont associés au cycle de conférences et de débats, ils contribuent à la journée de forum participatif et mettent en place, cette année, des soirées de partage de savoirs… A suivre !

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