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Retour sur la simulation de la COP 21 du master IPC

par Marion Turbiez-Miquel

La COP 21 ?

Il n’a échappé à personne que se tenait à Paris il y a un mois la COP21. Ce sommet mondial tant attendu a rassemblé 195 Etats autour des enjeux climatiques.

En 1988, suite à l’alerte lancée par le groupe d’experts intergouvernementales sur l’évolution du climat, l’Assemblée générale des Nations Unies crée la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques. Le projet présenté à Rio en 1992 (au Sommet de la Terre) est adopté par 195 pays ainsi que l’Union Européenne. C'est un texte juridique général qui donne des orientations en matière de climat. Il permet de créer un cadre relativement souple pour régir le climat au niveau mondial.

Par la suite, d'autres textes peuvent être adoptés pour rendre la convention concrètement applicable. Les pays signataires de la Convention se réunissent tous les ans dans le cadre des Conférences des Parties (les COP). Ainsi la COP qui s’est tenue à Paris en décembre est le 21ème rassemblement des parties signataires de la Convention.

On a fait de la COP 21 un événement majeur. Les pays parties avaient en effet pour mission de donner suite au Protocole de Kyoto en rédigeant un nouvel accord sur le climat. Les rapports de force entre les pays signataires ont aussi énormément évolué en 20 ans et ont contribué à faire de cette COP une rencontre capitale. Les pays du Sud ont en effet acquis de l’importance sur la scène internationale et entendaient bien peser dans les négociations.

 

Mobilisation autour de la COP 21

La COP21 était donc à bien des égards une rencontre clé pour l’avenir de la planète. Bien plus qu’un rassemblement de dirigeants et de décideurs, la Conférence de Paris a mobilisé l’ensemble de la société civile. En marge des négociations, diverses associations, ONG et entreprises se sont regroupées pour proposer ensemble des solutions pour lutter contre le changement climatique mais aussi pour éveiller les consciences. Des manifestations ont eu lieu en amont de la COP mais aussi tout au long de celle-ci pour sensibiliser à l’importance du défi climatique.

 

Organisation d’une simulation des négociations par les PUF

C’est dans ce cadre que les Presses Universitaires de France ont organisé une simulation des négociations de la COP21. Etudiants de la première promotion du master IPC (Ingénierie de la Prospective et de la Concertation) nous étions très au fait de l’enjeu que représentait cette COP. C’est pourquoi quand on nous a proposé de participer à ce projet nous avons tout de suite été très motivés.

Six délégations étudiantes représentant six pays ou groupe de pays participaient aux négociations.

  • délégation Brésil et pays du Sud: Etudiants du Master Gouvernance des Risques et de l’Environnement (GREEN) à l’Université de Caen
  • délégation Inde: Etudiants du Master 2 Gouvernance de projets de développement durable à Paris Saclay
  • délégation Canada et pays développés: Etudiants du Master Développement Durable & Responsabilité des Organisations à Paris-Dauphine
  • délégation Chine: Etudiants du Module Ecopolitique globale à l’Université de Lausanne
  • délégation Union Européenne: Etudiants  de l’Université de Lausanne
  • délégation Etats Unis: Master IPC Sciences Po Rennes antenne de Caen

 

Notre rôle était de représenter la position des Etats-Unis lors de ces simulations. Ce n’est pas le pays que nous aurions choisi spontanément car ses positions par rapport au protocole de Kyoto et de la CCNUCC en général le rendent difficile à défendre, mais finalement, nous nous sommes rapidement pris au jeu. La position des Etats-Unis est beaucoup plus complexe que ce que nous imaginions et nous avons été surpris par l’importance que prenait la question environnementale aux Etats-Unis.

 

Déroulé avant la simulation

Le travail des négociations s’est étalé sur presque deux mois. Deux mois pendant lesquels nous avons du rendre toutes les semaines un “position paper” sur un thème différent résumant nos prises de positions et nos engagements sur le sujet. Nous travaillions conjointement avec une équipe de communicants de Sciences Po Bordeaux qui se chargeait de publier des infographies et des articles avec les informations que nous leur transmettions.

Chaque semaine nous nous concentrions sur une des thématiques suivantes : Agriculture et occupation des sols, Finances, Industrie, et enfin, Transports et mobilités. Répartis en cinq groupes de trois ou quatre étudiants, nous avons fait de nombreuses recherches pour affiner nos positions et comprendre les enjeux des thématiques pour les Etats-Unis. Les publications sur les réseaux sociaux des positions et propositions sur chaque thématiques des différentes équipes ont permis de visualiser les points de convergence et les potentiels conflits entre chaque délégations.

Durant cette phase préparatoire, les délégations Union Européenne et Chine se sont rencontrées pour conclure d’une alliance lors des négociations. Nous avons choisi de faire de même et nous nous sommes alliés avec la délégation Brésil pour peser dans les négociations face aux pays émergents.

Au terme de ces semaines de travail, le Secrétariat Général a rassemblé nos propositions et rédigé un brouillon d’accord. Nous avons pu étudier celui-ci en amont et en discuter le jour des négociations.

 

D-Day

Les négociations se sont tenues le jeudi 9 décembre, à Paris non loin du Grand Palais. Le but des négociations était de rédiger un texte contraignant pour maintenir le réchauffement climatique global sous de la barre des 2°C.  Après les discours introductifs de chaque délégation, la journée a été rythmée par les plénières, les réunions en groupe et les discussions de couloir pour parvenir à un accord. Ne nous interrompant même pas pour déjeuner, nous avons travaillé sans relâche à l’aboutissement d’un accord ambitieux.

Le format des négociations, sur une journée, nous a forcé à agir rapidement et à peu approfondir certains points. En cela, le jeu de la diplomatie a parfois été altéré. Nous avions à coeur de trouver des solutions aux blocages qui sont apparus dans la journée tout en restant le plus fidèle possible à la position du pays que nous représentions, mais en assumant aussi notre côté progressiste.

Se mettre dans la peau d’un diplomate a été une excellente expérience. Il nous a fallu jouer sur les équilibres dans les commissions, observer, profiter des moments opportuns pour avancer des idées et parfois bluffer en demandant beaucoup plus que ce que nous souhaitions vraiment. Le jeu d’alliance entre les pays a pris de plus en plus d’importance au fur et à mesure de la journée, des délégations n’hésitant pas à interrompre le travail de certaines commissions en faisant irruption dans la salle. Nous avons aussi dû composer avec les conflits entre les délégations dont les positions divergeaient.

La journée de négociations s’est terminée par une belle réussite puisque nous sommes parvenu à un accord limitant la hausse de la température globale à 2.2°C. Quelques jours plus tard, les vraies négociations se sont terminées par un accord prévoyant de maintenir le réchauffement bien en dessous des 2°C initiaux. Les unes des journaux relayait l’accord “historique” qui avait été pris à Paris en janvier. Bien sûr, cet accord comprend de nombreuses zones d’ombre (sur lesquelles nous ne reviendrons pas dans cet article). Cependant, notre participation à la simulation organisée par les PUF nous a permis de comprendre l’exploit que représente un accord signé par 195 Etats.

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